La restauration est une activité particulièrement réglementée en matière d’hygiène. Le non-respect des normes de santé publique par un restaurant peut entraîner sa fermeture administrative. Toutefois, un arrêté disproportionné ouvre la voie à un recours : le référé-suspension.
Le restaurateur peut contester cette mesure en saisissant le juge administratif d’un recours en annulation pour excès de pouvoir. Toutefois, un tel recours prend 6 à 12 mois pour se transformer en décision. Il n’est donc pas efficace dans la mesure où la fermeture administrative aura déjà eu lieu. Le référé-suspension permet de suspendre l’effet de la fermeture administrative du restaurant dans l’attente de la décision par le juge du fond.
Qu’est-ce que la fermeture administrative d’un restaurant en matière d’hygiène ?
La fermeture administrative est une mesure de police administrative visant à lutter contre les restaurateurs causant un trouble à l’ordre public. Généralement, elle fait suite à une inspection des services départementales d’hygiène.
En matière d’hygiène, l’article L.3332-15 du code de la santé publique prévoit plusieurs causes de fermeture administrative :
- Les infractions à l’encontre des lois et des règlements en vigueur dans le domaine de la restauration
- Les atteintes à l’ordre public (santé, salubrité et tranquillité publique)
- Les actes criminels ou délictueux
Les règles d’hygiène ont leur source dans de nombreuses réglementations, les plus importantes étant le règlement européen 178/2002 du 28 janvier 2022 et le règlement du 29 avril 2004. En droit interne, il faut noter le décret 2016-1331 du 6 octobre 2016 sur les exigences vestimentaires des salariés et les arrêts du 8 octobre 203 et du 21 décembre 2009 dur les règles sanitaires concernant l’entreposage des denrées.
Enfin, il convient de rappeler qu’un membre du personnel du restaurant doit avoir suivi la formation hygiène et que le restaurant avant son ouverture doit avoir fait l’objet d’une déclaration obligatoire à la DDPP.
Par ailleurs chaque département possède un règlement sanitaire départemental contenant notamment les règles concernant la ventilation et les besoins d’extraction.
En pratique, les causes de fermeture les plus courantes en matière d’hygiène sont relatives aux zones de stockages, les plans de travail, l’hygiène du personnel ou encore l’utilisation du matériel de cuisine.
Il y a aussi de nombreuses fermetures concernant les débits de boisson. La vente d’alcool à un mineur ou la vente de cigarette sans les timbres de douane sont des occurrences fréquentes.
La durée maximum d’une fermeture administrative
La durée de la fermeture administrative est proportionnelle à la nature du manquement. Cette durée peut aller jusqu’à :
- 2 mois pour les atteintes à l’ordre public
- 6 mois ou 1 an par voie d’arrêté du ministère de l’Intérieur pour les autres infractions
La procédure de fermeture administrative doit respecter un certain formalisme pour être légale.
Préalablement à l’arrêté de fermeture du restaurant, l’administration doit délivrer un avertissement exposant les faits susceptibles d’entraîner une fermeture. Ainsi, le restaurateur mis en cause dispose d’un délai de 8 jours pour faire valoir ses observations.
L’avertissement permet aussi de corriger le tir et de se mettre en conformité et cela surtout s’il s’agit d’une défaillance exceptionnelle ou à laquelle il est facile de remédier.
Passé ce délai, l’administration est en droit de prendre un arrêté de fermeture administrative. Il indique faits susceptibles d’entraîner un trouble ou un risque de trouble à l’ordre public et les raisons de la fermeture.
La mesure doit être justifiée, nécessaire et proportionnelle aux faits constatés.
Il s’agit donc d’une mesure de police administrative et non une pure sanction, ce qui ouvre de manière plus large la discussion en référé, que par exemple dans le cadre d’une fermeture administrative en raison de la présence de travailleurs non déclarés ou en situation irrégulière.
Comment contester une fermeture administrative pour non-respect des normes d’hygiène ?
La contestation d’un arrêté de fermeture administrative d’un restaurant pour non-respect des normes d’hygiène peut passer par la procédure du référé-suspension. Il s’agit là d’une une procédure complémentaire à la requête en annulation de l’arrête de fermeture devant le juge du fond.
Le référé-suspension est une procédure ayant pour but de suspendre les effets d’une décision administrative. Ainsi, le juge des référés doit se prononcer entre 48h et 1 mois en fonction de la gravité. La requête de référé complète le recours pour excès de pouvoir. Les deux forment un tandem.
En pratique, le juge de permanence qui reçoit la requête en référé-suspension va apprécier le degré d’urgence, il convient donc de commencer la requête par une description précise de la situation d’urgence. Il convient d’expliquer qu’il s’agit d’une urgence plus à 48h qu’à 1 mois afin d’obtenir un audiencement rapide.
Pour donner droit à un référé-suspension, le requérant doit démontrer les éléments suivants :
- Une situation d’urgence : Le caractère d’urgence s’apprécie concrètement aux faits constatés. Le requérant doit démontrer que le préjudice de la mesure administrative est imminent. On peut démontrer l’urgence financière.
- Un moyen propre à créer un doute sérieux : Le doute sérieux porte sur la légalité de la décision en cause. Il faut indiquer l’excès de pouvoir de l’administration.
Le juge des référés contre un arrêté de fermeture d’un restaurant
Pour saisir le juge des référés, le restaurateur doit passer par la plateforme Télérecours. Il est impératif de fournir le maximum d’éléments de preuve démontrant la disproportion de la mesure administrative.
Nous vous conseillons de produire entre autres :
- L’arrêté de fermeture administrative du restaurant
- Le recours pour excès de pouvoir
- Les factures de denrées périssables
- Attestation de formation du personnel à l’hygiène alimentaire
- Protocole d’informations sur la pratique de l’hygiène du personnel
- Plan de nettoyage et de désinfection des zones de la cuisine (détail des zones nettoyées, du mode opératoire de nettoyage, de la fréquence de nettoyage)
- Attestations de l’aptitude au contact alimentaire des matériaux (tables, vaisselles, ustensiles)
- Attestations de maintenance du matériel (appareil pour la mise sous vide, station de lavage, chambres froides, systèmes de nébulisation)
Il tranchera soit en confirmant l’arrêté de fermeture administrative soit en ordonnant la suspension de la mesure. En cas de suspension, le restaurant pourra réouvrir.
La décision du juge des référés est rendue en dernier ressort. Elle n’est susceptible que d’un pourvoi devant le Conseil d’État. Il faut le former dans un délai de 15 jours suivant la décision du juge des référés. Toutefois, la mesure de référé n’ayant pas l’autorité de la chose jugée, il est possible de saisir la même juridiction plusieurs fois du même référé.
Le référé-suspension vient en concurrence du référé-liberté. Les deux sont possibles. Il convient d’analyser dossier par dossier le meilleur recours. Concrètement, le référé suspension donne plus de marge de manœuvre au juge. L’atteinte a une liberté fondamental n’est pas un critère. Cependant, le juge peut réagir plus lentement et le rendre donc inutile en cas d’une fermeture administrative de quelques semaines.
Conclusion
Nos avocats, experts dans le domaine de la restauration, sont à votre disposition pour toutes questions ou renseignement.